Pause jeunesse

Une aventure aux confins du monde : Les larmes des avalombres – Alexandre Chardin

Couverture des "Larmes des Avalombres" d'Alexandre Chardin

Nuits sanglantes

Le père de Nandeau est atteint d’un mal inconnu qui le ronge à petit feu. Quelque jour avant le nuit de Grand sang, à bout de force, il décide de fuit son village et sa famille. Sans aucunes explications. Sans aucunes indications. Nandeau cherche des réponses auprès du dangereux Tourkoul. Mais ce dernier, loin d’être un allié, est responsable des nuits sanglantes, où bêtes et hommes meurent. Nandeau se lance alors dans une quête folle, afin de retrouver son père et de sauver son village.

Sueurs froides, rythme et suspense

Pris au hasard sur une table des nouveautés de ma bibliothèque, ce roman est une très belle découverte ! C’est un texte riche, tant par son vocabulaire que par son univers. Ce roman, aux chapitres très courts est plein de rebondissement. Il nous tient en haleine du début à la fin grâce à son rythme et son suspense. Immergé dans l’univers de Nandeau, nous partageons ses sueurs froides et ses victoires.

Nature, légendes et créatures

Ce roman nous immerge dans un monde, pas si loin du notre, avec une nature omniprésente. Cet univers est bercé par les légendes et abrité par des créatures légendaires. Les descriptions de paysages rencontrés par notre héros dans sa quête peuplent le récit de belles images.

La nature est son allié, l’ordre des choses, le bien face à la magie destructrice de Tourkoul. Elle est celle qui reste à se place, comparativement à la figure diabolique de Tourkoul, avide de pouvoir. Mais la nature et les créatures fantastiques, lumières de ce monde, sont entrain disparaitre. Nous trouvons ici pleins de parallèles entre le personnage de TourKoul et le désir de domination de la nature et de possession à outrance de notre société.

Ce récit est emprunt d’une grande violence. Les délires sanglants des chevaliers, les corps meurtris par Tourkoul, s’ajoutent à la destruction de la nature. C’est un roman d’initiation, où nous voyons évoluer petit à petit le héro, intrépide et têtu, devenant par la suite un homme capable de tous les sacrifices.

Une superbe amitié entre un renard et un humain

Le jeune Nandeau est intrépide, courageux mais aussi très curieux. Il connait très bien la forêt et a la faculté particulière de pouvoir communiquer avec les animaux. Sa curiosité va lui jouer des mauvais tours, et va le forcer à affronter le terrible Tourkoul, responsable des malheurs de son peuple.

Pour affronter toutes ses épreuves, Nandeau ne sera pas seul : son ami  Rubah sera toujours à ses côtés, il lui a promis. Cette amitié est peu commune car  Rubah est un renard. Loyal, futé et extrêmement fidèle, il sera le guide du jeune garçon, son moteur mais aussi son maitre, en lui transmettant ses connaissance de la nature. La relation qu’ils entretiennent, est une véritable lumière dans ce récit, Rubah est comme un père pour le jeune homme.

Aux antipodes, la figure de Tourkoul est celle du mal absolu. Rongé par l’ambition, de désir de pouvoir, ce dernier renie petit à petit sa nature humaine pour se tourner vers l’occulte et la puissance destructrice. Il est malin, intelligent, manipulateur. Il tisse telle une araignée son emprise autour du jeune Nandeau, qui bientôt sera obligé de l’aider à arriver à ses fins..

Le roman en bref

Avec rythme, profondeur et suspense, ce titre nous entraine dans un univers noir peuplé de légendes et de créatures fantastiques. Un roman d’aventure fantasy très bien mené, à découvrir !

Les larmes des Avalombres
Alexandre Chardin
Magnard, 2018

Ma note : ★★★★★

Vous cherchez un roman fantasy avec un jeune héro ? Découvrez également L’apprenti épouvanteur – Joseph Delaney.
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Pause jeunesse

Un roman sensible et touchant : Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers

Une rencontre improbable

Aristote, quinze ans, dit Ari est un solitaire. Mal dans sa peau, il a sombré dans un sourde colère. Sans ami, il passe son temps à la piscine. Un jour, il y rencontre Dante, un jeune garçon à la personnalité opposée. Jovial, expansif. Même si tous les oppose, ils vont finir par lier amitié, qui va profondément changer Ari…

L’univers enveloppant d’une pépite

J’ai découvert ce roman à travers des vidéos Youtube sur le prix des incorruptibles et j’avoue que dans un premier temps son titre m’a laissé dubitative. Après la découverte des merveilles que cache ce roman, je le trouve par ailleurs peu représentatif du contenu. Ne vous fiez pas à lui, je vous présente aujourd’hui une pépite, un coup de cœur.

La plume est enveloppante et les chapitre courts donne du rythme à ce roman qui, compte tenu de sa taille aurait pu comporter des longueurs. Le ton est très juste, l’auteur nous enveloppe dans son univers avec douceur mais sans pour autant gommer la dureté de certaines situations.

Une quête identitaire

Ce roman, en véritable récit de vie, nous fait suivre la quête identitaire de deux jeunes adolescents en pleine remise en question. Au fil des pages, nous suivons leur évolution, l’un vis à vis de l’autre, mais aussi leur évolution interne. Amitié, amour, mal-être, différence, tous les sujets adolescents sont abordés, toujours avec finesse et intelligence. Nos deux personnages sont mis à nus et nous dévoilent toute leur sensibilité et leur humanité.

Deux personnages liés mais si différents

Aristote, communément appellé Ari est un garçon renfermé, solitaire et très en colère. Il vit avec ses deux parents et supporte mal le poids des fautes de son frère, actuellement en prison.

Dante, c’est tout l’inverse. Joyeux, fragile et passionné. Toujours optimiste, c’est un doux rêveur. S’ils sont le ying et le yang, c’est leur différence qui va fasciner Ari. Ils vont nouer alors une complicité extrêmement forte, inclassable et si belle à lire.

Le roman en bref

Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers est un roman sensible, enveloppant, une petite pépite que je recommande chaudement. Toujours juste, il nous conte une de plus belle rencontre qu’il m’est été donnée de lire, créatrice de questionnements succulents.

Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers
Benjamin Alire Sáenz
Pocket Jeunesse, 2019

Ma note : ★★★★★

Vous cherchez un joli roman d’amour ? Vous aimerez également Eleanor and Park de Rainbow Rowell.
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Coin-blabla

Tag PKJ : 10 questions autour du voyage et des vacances

Coucou les bookaddicts ! Désolé pour ma petite absence, j’avais pas mal d’articles sur le feu à vous partager mais une flegme incommensurable de les terminer. Que voulez-vous c’est les vacances ! Mais je reviens en force, c’est promis ! Aujourd’hui, j’ai décidé de répondre à un Tag PKJ d’actualité puisqu’il nous parle de vacances :

1) Un livre léger

Love & Gelato de Jenna Evans Welch
Bayard jeunesse, 2018

A la mort de sa mère, Lina décide de rencontrer son père et part en Italie. A son arrivée, c’est la douche froide. Mais elle va bientôt faire la rencontre de Ren et à ses côtés, partir à la découverte de la vie de sa mère à Florence.

2) Un livre que vous souhaitez lire cet été

Le soleil est pour toi de Jandy Nelson
Gallimard jeunesse, 2015

Noah et Jude était des jumeaux fusionnels. Jusqu’à leurs 16 ans. Depuis qu’un drame les a séparé. Comment vont-ils pouvoir à nouveau être réunis ?

3) Un livre que vous aimeriez acheter

Alma le vent se lève de Timothée de Fombelle
Gallimard Jeunesse, 2020

Afin de retrouver son petit frère, Alma quitta sa vallée protégée d’Afrique. Au même moment, au Portugal, Joseph monte clandestinement à bord d’un navire d’explorateur.

4) Un livre que vous avez dans votre liseuse

Je n’ai pas de liseuse donc je ne peux pas répondre à cette question 😉

5) Un livre avec une valise ou un sac sur la couverture

Naissance des cœurs de pierre d’Antoine Dole
Actes Sud, 2017

Dans le nouveau monde, chaque enfant doit participer au programme lors de ses douze ans. Après une injection, toutes les émotions disparaîtrons. Jeb doit y rentrer cette année. Mais plus le temps passe, moins il ne peut se résoudre à perdre ses ressentis.
Aude entre dans un nouveau lycée. Harcelée et sous pression, elle perd peu à peu le goût de vivre. Sa rencontre avec Mathieu, un surveillant dont elle va tomber amoureuse va faire tout basculer. 

6) Un livre qui parle de vacances

La rentrée n’aura pas lieu de Stéphane Behamou
Don Quichotte éditions, 2014

Michel Chabon travail pour le Ministère des Transports. Comme toutes les années, il est chargé de créer les messages routiers à destination des vacanciers et de veiller à leur bon fonctionnement. Seulement, cette année, les aoûtiens ont décidés de ne pas rentrer et de prolonger leur vacances jusqu’à une durée indéterminé. Michel est alors chargé de trouver une explication et de faire rentrer ces aoûtiens, qui mettent en péril la société, le monde du travail et les habitudes de chacun.

7) Un livre d’aventure

Quelqu’un qu’on aime de Séverine Vidal
Sarbacane, 2015

Matt et son grand père Gary atteint de la maladie d’Alzheimer, partent faire un road trip dans l’ouest Américain. Le but de se voyage est de refaire la tournée de Pat Boone, un crooner mythique des année 50, dont Gary est fan et qu’il a suivi sur les routes durant sa jeunesse. Cependant, tout ne va pas se dérouler comme prévu et trois autres personnages viennent se joindre au projet : Luke, Antonia et Amber, la fille de Matt. Ensemble, ils vont partager une extraordinaire aventure et apprendre à regarder leur vie différemment.

8) Un livre qui parle de voyage dans le temps

Outlander de Diana Gabaldon
J’ai lu, 2014

Nous sommes en 1945. Claire retrouve son mari après une longue séparation à cause de la guerre. Mais au cours d’une promenade, elle est irrésistiblement attiré par un mystérieux mégalithe. En le touchant, elle se retrouve projetée en 1743, au cœur de l’Irlande…

Je vous ai également trouvé une vaste bibliographie sur Babelio si vous êtes intéressé par cette thématique.

9) Un livre de la couleur de votre valise/sac

Toffee et moi de Sarah Crossan
Rageot, 2020

Après sa fugue, Alison trouve refuge chez Marla, une femme tout aussi blessée qu’elle. Ensembles, elles vont tenter de se reconstruire.

10) Un livre qui se déroule au dernier endroit où vous êtes partis en vacances

Cheval océan
Stéphane Servant
Actes sud junior, 2014

Angela rêvait de la mer, des côtes Portugaise. Cette force furieuse de la nature, ce cheval au galop lui rappelle sa grand -mère. Aujourd’hui, elle l’a devant elle et elle lui crie sa rage de vivre, sa tristesse, sa colère et son espoir.

Et vous, quelles réponses auriez-vous données ?
Besoin d’idée de lecture pour cet été ? Consulter mes réponses au Tag PKJ de l’été !
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Pause jeunesse

Le road trip d’un duo atypique incroyablement touchant : Soleil Glacé – Séverine Vidal

Couverture de "Soleil glacé" de Séverine Vidal

Une rencontre inattendue

A la mort de son père, qu’elle connaissait à peine, Luce apprend qu’elle a en fait une seconde famille. Et sa rencontre avec son frère Pierrot va changer sa vie…

Un roman tant attendu

J’ai découvert cette autrice avec Quelqu’un qu’on aime que j’avais adoré. Dans ma wish list de mars, je vous avait parlé de ma volonté de lire ce roman, alors quand je l’ai vu dans les nouveautés de ma bibliothèque, je me suis dépêché de l’emprunter !

Je suis encore une fois emporté par la très jolie plume de Séverine Vidal et sa façon d’amener tout en douceur des sujets délicats. Si j’ai trouvé globalement l’intrigue bien menée, je regrette cependant des rebondissements trop faciles et une fin un peu abrupte, qui ne gâche heureusement pas le bonheur de cette lecture.

Pertes et gains

Les premiers chapitres de ce roman nous font entrer dans le vif du sujet : la perte. Nous suivons une Luce, complètement dépassée par les évènements. En premier lieu, sa rupture avec son copain, quelle surprend très vite avec une nouvelle fille, alors qu’elle n’arrive pas à tourner la page. Puis soudainement, la mort d’un père, qui pourtant absent de sa vie, lui laisse un gout d’inachevé. Ces deux événement ébranlent fortement notre adolescente qui commence à perdre pied. Elle s’isole de tous, stalk son ex-copain… C’est aux funérailles de son père que sa vie va basculer. Elle va rencontrer l’autre femme et la vie parallèle de son père va lui sauter au visage. Si dans un premier temps le choc et la colère grondent, Luce va également faire la rencontre de son demi-frère, atteint d’un handicap. Lui aussi souffre de cette perte et ensembles, ils vont affronter l’absence définitive de leur père. C’est en ce rapprochant de sa famille, en autorisant à nouveau l’amour à rentre dans sa vie que Luce va guérir.

Le texte met aussi en lumière la famille hors du commun de Luce. Elle vit seule avec sa mère et sa sympathique belle-mère depuis la séparation de ses parents. Si ces deux femmes lui apportent la stabilité et la bienveillance dont elle a besoin, le manque de son père se fait également ressentir. Même après sa mort, elle n’est par ailleurs pas tendre avec ce père, roi des promesses en l’air.

C’est pour contrecarrer les promesses nous-tenus par son père quelle décide de dépasser le handicap de son frère et de partir en road trip avec lui, une aventure un peu folle quand on sait que Pierrot a besoin d’énormément de stabilité car il est X fragile. Ce handicap, proche de l’autisme affecte son comportement mais également sa manière de communiquer. Nous le découvrons à travers Luce dans toute sa complexité.

Un duo fraternel touchant

Pierrot, est le personnage doudou de ce roman. Dès notre rencontre, nous tombons avec Luce sous le charme de ce jeune homme, si tendre, touchant et plein de vie. Nous suivons à travers Luce les difficultés de son handicap, ses tics, son besoin de rituels, ses crises. Il est plein de sincérité et de gentillesse. Loin d’être un personnage dépendant, il est un véritable pilier pour Luce, qu’il peut parfois mettre dans des situations inconfortables mais sans qui l’aventure serait diamétralement opposée. Sa relation avec Luce, pleine de nouveautés déroutantes va être également bénéfique à Pierrot qui va progresser dans sa gestion de son handicap.

Luce est une fonceuse, téméraire et avec un très fort caractère. C’est une battante que la vie a déjà pas mal éprouvé. Sa rencontre avec Pierrot, véritable coup de foudre fraternelle, va faire énormément grandir Luce. Adolescente blessée et un peu rebelle vis à vis des cadres, elle va petit à petit bousculer ses habitudes. Son amour inconditionnel pour son frère va l’aider à se reconstruire, à relativiser et à trouver un véritable but dans la vie. Ensemble, ils vont affronter le deuil de leur père, si absent pour Luce, si important pour l’équilibre de Pierrot.

Le roman en bref

A travers un road trip improbable, Séverine Vidal aborde tout en douceur des thématiques compliquées comme le deuil ou le handicap. Un roman plein d’émotion et de tendresse sur l’amour familial inconditionnel qui donne chaud au cœur.

Soleil glacé
Séverine Vidal
Robert Laffont, 2020

Ma note : ★★★★☆

Vous cherchez une belle histoire autour du handicap ? Découvrez également Ma dernière chance s’appelle Billy D. d’Erin Lange.
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Découvertes Adulte

Survivre dans le paroxysme de l’horreur – La route de Cormac McCarthy

Un monde anéanti

Dans un monde recouvert par la cendre, un homme et un enfant errent sur la route. Leur but, s’éloigner le plus possible des montagnes et du froid, pour atteindre la mer, au sud. Mais sur la route, de nombreux dangers les guettent et toute trace d’humanité a disparue.

Adieu humanité

C’est une collègue qui m’a conseillé ce roman, que j’ai eu la chance de trouver dans la boite à livre de ma bibliothèque. Il représente le type de roman que j’aime lire en ce moment ! Les premières pages m’ont clairement décontenancé. Ce roman post-apocalyptique pose la question : comment survivre quand l’humanité (dans la sens de la manière d’être et en tant qu’espèce) a disparu ?

La plume est parfois très belle, avec de belle métaphores et vocabulaire précis mais j’ai été extrêmement désamorcé par certaines tournures de phrase comme l’usage excessif du « et » et des répétitions. Ce choix créé un rythme particulier mais est dérangeant pour la lecture. Les premiers chapitres ont été douloureux pour moi, mais l’histoire et assez prenante pour nous faire oublier ces détails stylistiques. Ce style assez déroutant m’a beaucoup étonné car ce roman a reçu le prix Poulizer en 2007.

Humains-monstres et cadavre

Dans ce monde, les animaux ont également disparu et les espaces sont recouverts par la cendre. Les hommes vivent avec des masques, leurs pas laissent des traces de pied noircies. L’eau est noires. Les arbres sont soit brûlés, soit mort étouffés par la cendre. Le roman pose une atmosphère extrêmement lugubre avec une hypothèse très sombre de fin du monde. Contrairement à d’autres roman post-apocalyptique que j’ai pu découvrir où la nature, les végétaux et les animaux ont repris leur droit, l’auteur traite ici d’un univers qui a presque totalement disparu et dont les seuls restes sont les friches humaines.

Une atmosphère glaçante, suffocante, horrifique

Cette omniprésence du gris fait écho aux émotions de nos personnages et aux autres êtres humains qu’ils rencontrent lors de leur périple. L’homme et l’enfant errent sur la route, autoroute dévastée, entre humain et bête dont le seul but et de trouver à manger. Au fil de la route ils vont explorer dans maisons, des villes, en cherchant le moindre objet utile à leur survie. Il ne reste presque plus rien, ce qu’ils trouvent ne sont que des miettes laissées par d’autres personnes passées précédemment.

Nos personnage sont également confrontés au froid, un froid qui les glaces jusqu’aux os. L’auteur trouve les mots extrêmement juste pour poser une atmosphère glaçante, suffocante, prenante, horrifique. Il décrit, à travers des scènes atroces, le paroxysme de l’horreur que nos deux personnages sur la route. Les seuls humains rencontraient sont les cadavres et reliquats d’une ancienne vie que nous conte, par petite touche l’homme quant il parle à son enfant.

Il ne lui laisse aucune illusions. Contrairement à d’autres romans du genre, l’homme et l’enfant ne porte en eux aucun espoir. Aller plus loin n’est pas espérer retrouver l’humanité mais juste vivre un jour de plus. L’humanité qu’ils croisent sur la route est loin d’être bienveillante et accueillante. Les humains que rencontrant l’homme et l’enfant sont tous les ennemies, qu’ils souhaitent leur voler leur bien ou les dévorer.

Des personnages déshumanisés

Le lecteur n’est pas amené à s’identifier aux personnages. Déshumanisés, ils ne portent pas de nom, n’ont pas d’identité propre. Les seuls éléments que l’auteur nous donne à voir sont des scènes de survie et quelques brides du passé de l’homme qu’il conte à l’enfant. Seule once de positivité, l’amour que porte l’homme à l’enfant et qui le pousse parfois à prendre des risques.

Le roman en bref

Malgré un style déroutant, à cause notamment de la répétition du « et », ce roman reste prenant et addictif. Nous suivons la fuite de l’homme et l’enfant à travers des paysages décimés par la cendre. L’humanité restante est devenue cannibale et montreuse. Plus aucun espoir, pour le lecteur, comme pour les personnages. L’auteur nous dresse ici un portrait sans détour d’une humanité détruite et vouée à l’extinction totale.

La route
Cormac McCarthy
Editions de Noyelles, 2008

Ma note : ★★★☆☆

Vous cherchez un autre roman post-apocalyptique ? Vous aimerez aussi The rain de Virginia Bergins.
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Pause jeunesse

Une ode à la préservation de la nature : Et le désert disparaîtra – Marie Pavlenko

Couverture de "Et le désert disparaîtra" de Marie Pavlenko

Des arbres pour survivre

Samaa vit dans un monde futuriste où l’intégralité de la surface de la terre, ou presque, a disparue ensevelie sous le sable. Elle vit avec son peuple nomade dans le désert. Pour survivre, ils traquent les derniers arbres, les coupent et les vendent à la ville. C’est un travail d’hommes, les femmes, elles, restent au campement pour faire les taches ménagères, s’occuper des enfants… Mais Samaa rêve de devenir un chasseur d’arbre. Un jour, elle décide de désobéir et suivre les hommes à travers le désert. C’est là qu’elle va véritablement rencontrer l’arbre.

Renaissance et nature

J’ai découvert ce roman dans le cadre d’une lecture commune avec @mlle_cailloux_bookine et nous avons eu toutes les deux un avis différent. J’avais déjà découvert Marie Pavlenko dans Un si petit oiseau. Il m’avais ému, tant par le sujet ; la renaissance ; un sujet puissant et fort, que par l’amour que Marie Pavlenko transmet pour la nature. Et le désert disparaîtra est dans la droite ligne de cette thématique.

Un objet-livre parlant

Pour parler dans un premier temps de l’objet-livre en lui-même, il a été réalisé avec des forêts durables, en France, avec de l’encre d’origine végétale. Il n’a pas été plastifié… Le marque-page offert avec le livre était également en papier recyclé. Même si la couverture est très simple, beige avec des petites feuilles, on ressent déjà la teneur du message transmis à l’intérieur du livre.

Une lenteur et une solitude poétique

Ce texte se construit tout en lenteur, c’est une petite dentelle où on voit apparaître chaque jour une nouvelle maille. Nous ressentons l’attente de Samaa, le temps qui se dilate, lentement, son sentiment de solitude. Cette lenteur nous permet d’explorer avec l’héroïne les choses que l’on oublie de voir dans notre vie quotidienne prise dans cette vitesse, cette course. Elle est le vecteur de poésie du récit.

Nous observons avec Samaa la nature, comme nous pouvons d’ailleurs le faire lors de ce confinement, dans tous ces détails : les petits insectes qui peuplent l’arbre, les grains de sables, les feuilles qui tombent. Nous découvrons l’incroyable biodiversité que peut accueillir un arbre.
Ce texte m’a beaucoup touché et fait écho à des éléments de mon quotidien. J’ai la chance d’avoir à côté de mon balcon deux magnifiques cèdres, sur lesquels je peux observer des oiseaux, un écureuil… Et je sais que si je descend et que je fais comme Samaa, je m’assoie à coté du tronc, je pourrais percevoir ce qu’elle perçoit et ressentir la fascination pour l’arbre qu’elle ressent.

Une héroïne courageuse et curieuse

Samaa est courageuse, pugnace. C’est une jeune femme pleine d’ambition qui va contre les dictas de son peuple. Elle décide de suivre son cœur et choisir son futur malgré la non-conformité avec la place de la femme dans sa tribu. Elle est aussi curieuse et ouverte.

Samaa connait l’arbre uniquement comme une denrée qui lui permet de survivre, elle ne connait pas la faune ou la flore qu’il abrite. Avant sa mésaventure, les arbres étaient des créatures presque monstrueuses, des dangers pour l’homme à éliminer. Au fur et à mesure, elle va se rendre compte que l’arbre est créateur de vie. Elle nous fait partager cela au fil des pages, jusqu’à la fascination.

Le roman en bref

Un magnifique texte, où la lenteur, la solitude et le silence sont les clés pour découvrir notre incroyable écosystème, la vie que peux abriter un arbre. Et le désert disparaîtra est un texte puissant, une ode à la préservation de la nature.

Et le désert disparaîtra
Marie Pavlenko
Flammarion jeunesse, 2020

Ma note : ★★★★★

Vous cherchez un autre titre avec un message écologique ? Vous aimerez aussi L’attrape rêves de Xavier-Laurent petit.
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Découvertes Adulte

Des familles déliées, des destins liés : Les loyautés – Delphine de Vigan

Des personnages en proie à leur démon

Hélène, une jeune professeur de collèges violentée lors de son enfance s’inquiète pour l’un de ses élèves, Théo. De plus en plus sombre ce dernier joue à un jeu dangereux en entraînant son meilleur ami Mathis. Il faut dire que Théo vit une situation familiale difficile depuis le divorce de ses parents. Chez Mathis, la crise familial est souterraine, sa mère Cécile voit peut à peu sa vie parfaite se disloquer…

Une lecture commune forte en émotions

J’ai découverte ce roman dans le cadre d’un lecture commune avec @mlle_cailloux_bookine. Nous cherchions un roman en commun pour le confinement et il s’avère que nous venions toutes deux de l’acheter ! Ce n’est pas le premier roman de Delphine de Vigan que je lis, je vous avez d’ailleurs déjà parlé de mon coup de cœur pour Les heures souterraines. C’est donc avec grand plaisir que je me suis lancée dans ce nouveau texte.

S’il m’a moins emballé que ma précédente lecture, il reste fort et comme toujours, plein de justesse. Il nous laisse le cœur tambourinaire, la gorge noué…

Violences invisibles, liens souterrains

Des violences invisibles, des rancœurs, un mal-être, chaque personnage expose ses failles sans détour. Comme toujours, Delphine de Vigan dépeint l’humanité dans toute sa complexité. Chaque personnage que nous rencontrons porte en lui une souffrance profonde, un boulet souterrain, non-dit, qu’il traîne dans son existence. Ce boulet est ce qui les lient tous, ce qui crée leur destin commun.

Loin d’être anodines, les problématiques personnelles de chacun des protagonistes sont criantes d’actualité. Le divorce, dans un premier temps, qui frappe de nombreuses de famille, disloque les liens tissés en mettant en premières lignes les enfants. La dépression, mal de notre société moderne, qui engloutie de nombreux individus. La rancœur, dans laquelle il est facile de cacher, le déni ou encore le besoin d’héroïsme caché en chacun de nous… Les visions sont ici noires, même si Delphine de Vigan laisse planer tout au long de son texte, une lueur d’espoir, petite étincelle.

Des personnages complexe et juste

Les chapitres s’enchaînent, alternances courtes de point de vue titrés comme des appels à confidence. Nous rencontrons des personnages profondément humains et riches. La première, Hélène, la principale protagoniste de ce récit. Professeure dans un collège, elle traîne les vestiges d’un passé violent où enfance rime avec maltraitance. Elle est la professeure principale de Théo, un jeune garçon qui l’inquiète beaucoup car elle le croit lui aussi victime. Second personnage présenté, Théo est un enfant meurtri par le divorce de ses parents, tiraillé entre un père dépressif et une mère pleine de rancœur.

Autour de ces deux personnages principaux gravitent Mathis, le meilleur ami de Théo, entraîné malgré lui dans les tréfonds du mal-être de son ami et Cécile, sa mère, névrosée, dépassé par une vie quotidienne qu’elle ne supporte plus.

Le roman en bref

A travers sa plume vibrante, Delphine de Vigan nous présente des personnages humaines qui exposent leur failles. Un roman juste, sensible sur les violences invisibles, les rancœurs, les mal-être et passifs qui nous lient.

Les loyautés
Delphine de Vigan
Le livre de poche, 2019

Ma note : ★★★★☆

Vous cherchez un autre roman avec des personnages malmenés par la vie ? Vous aimerez aussi Repose-toi sur moi de Serge Joncour.
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Pause jeunesse

Quand Alzheimer entre dans une famille : Miée – Xavier-Laurent Petit

Quand le monde d’Anna s’effondre…

Anna passe beaucoup de temps avec sa grand-mère. Leur petit bonheur à toutes les deux : faire de roudoudous ; de petits caramels mous, moulés dans des coquillages. Mais un jour, Miée divague, Miée commence à perdre la tête et c’est tous le petit monde d’Anna qui en est chamboulé. Elle décide alors de tout faire pour que Miée retrouve la mémoire.

Finesse, justesse, délicatesse, tristesse

Ce petit texte traînait depuis très longtemps dans ma bibliothèque. Pour cette période de confinement, j’ai décidé de me challenger et d’essayer de lire un texte par jour. J’ai décidé de commencer par ce roman car j’avais adoré l’autre texte de Xavier-Laurent Petit que j’avais lu, L’attrape rêve, un véritable coup de cœur.

Avec ce roman, je retrouve la plume tout en justesse de Xavier-Laurent Petit. Avec encore une fois un sujet difficile, abordé avec délicatesse, justesse et finesse sans tomber dans le pathos. Ce roman est très court mais en très peu de mots, l’auteur réussi à nous faire passer un message d’amour et de tolérance, triste mais fort à la fois.

Maladie et famille

La thématique centrale de ce roman est, vous l’avez peut-être compris, la maladie d’Alzheimer, qui touche malheureusement beaucoup de famille. Il nous dépeint dans toute sa dureté, mais sans brutalité, la souffrance de l’entourage comme de la personne atteinte. On y trouve les phases du début de la maladie : les petits oublis, puis les phases un peu plus critiques de perte de mémoires ou de repères, de perte de vocabulaire, jusqu’à des phases qui font perdre définitivement l’autonomie.

Des personnages lumineux et pleins d’amour

Tout cela nous est décrit dans le regard d’une petite fille qui voudrait que sa grand-mère redevienne comme avant. L’amour inconsidérable qu’a cette petite fille pour sa grand-mère est extrêmement puissant. Il la pousse à tout faire pour rendre heureuse sa grand-mère, même lorsqu’elle sait que cette dernière ne pourra jamais aller mieux.

Le personnage d’Anna est une petite boule d’énergie, pleine d’espoir. C’est une lumière dans l’environnement hostile de sa grand-mère. Elle est extrêmement dévouée et disponible pour sa famille. Globalement, les personnages présents dans ce roman sont tous lumineux et positifs. Tous sont dans l’empathie, la bienveillance, dans l’amour.

Le roman en bref

Mené par une plume tendre et juste, ce roman brosse le portrait d’une famille ébranlée par la maladie de l’un de leur proche. Triste, sans tomber dans le pathos, il nous expose l’amour inconditionnel d’une petite fille pour sa grand-mère. Un texte coup de cœur, que je vous conseille de toute urgence !

Miée
Xavier-Laurent Petit
L’école des loisirs, 2001

Ma note : ★★★★★

Vous cherchez un roman touchant autour de la maladie d’Alzheimer ? Découvrez aussi Quelqu’un qu’on aime de Séverine Vidal.
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Découvertes Adulte

Une claque de force et de justesse : Elle va nue la liberté – Maram al-Masri

« L’avez-vous vu ?
Il portait son enfant dans ses bras
et il avançait d’un pas magistral
la tête haute, le dos droit
Comme l’enfant aurait été heureux et fier
d’être ainsi porté dans les bras de son père
Si seulement il avait été
vivant »

Une plume précise, sensible, vibrante

A force que je vous parle de cette poétesse, vous allez en avoir mare mais je ne m’en lasse pas ! C’est le troisième recueil de Maram al-Masri que j’ai l’occasion de découvrir. Je suis toujours autant touchée par sa poésie. Sa plume, est très précise, sensible, vibrante. En très peu de vers, elle pose le décors, minutieusement et nous fait transmet des bombes émotionnelles. A chaque recueil que le découvre c’est l’émerveillement. Fortes, directes, ses œuvres se goutent petit à petit, en prenant le temps de les digérer. Des coups de point à chaque lecture.

Marah al-Masri écrit en vers libre. Son vocabulaire est simple, accessible. Nous ne sommes pas dans la poésie décorative avec des rimes riches, des mots alambiqués mais dans l’épuration et la précision.

Le printemps arabe en Syrie

Maram al-Masri est originaire de Syrie. Maintenant, elle vit en France mais les sujets qu’elle traite sont toujours en rapport avec ses racines. Ici particulièrement, car elle nous parle du printemps arabe et des souffrances des Syriens pendant cette période.

Dans son extrême précision, la poétesse donne corps aux maux, elle les nomme à travers des chiffre, des noms de victimes… Les tableaux dépeints sont d’une cruauté et d’une violence extrême même si les mots choisis nous enveloppe dans une sorte de bulle ; une douce violence.

Une œuvre engagée

Ce recueil est engagé. C’est une œuvre de rébellion. Maram al-Masri exprime au monde les voix et les visages de milliers de syriens. Même s’il dépeint en premier lieu l’histoire du printemps arabe, ce recueil fait écho à l’actualité, par la double lecture de certains poèmes.

Le poème cité plus haut est celui qui m’a le plus marqué du recueil. Il est pour moi très représentatif du contenu. On ressent la grande force de ce monsieur qui porte son fils tel un étendard, ses souffrances et sa détermination, tout comme l’extrême violence de la situation.

Le texte en bref

Elle va nue la liberté donne âme, voix et corps au peuple syrien, pied et poing liés par un système politique contraignant. Mené par une plume simple, précise et extrêmement touchante, c’est un recueil poignant, criant de vérité, une ode au courage et à la liberté.

Elle va nue la liberté
Maram al-Masri
Éditions Bruno Doucey, 2013

Ma note : ★★★★★

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Pause jeunesse

Trois femme en quête de liberté : Le ramadan de la parole – Jeanne Benameur

Trois femmes en lutte

Une jeune femme des années 20 qui refuse de se faire corseter, une jeune musulmane qui remet en question les valeurs traditionaliste de sa famille, une jeune fille qui déteste les affiches où le corps de la femme est un argument marketing. Chacune, à leur échelle, trois jeunes femmes se battent pour leur liberté, quitte à faire le ramadan de la parole.

Trois nouvelles résolument féministes

Ce recueil composé de trois nouvelles a été réédité pour notre plus grand plaisir ! Il fait aujourd’hui partie de la collection « d’une seule voix », que vous devez connaitre, si vous me lisez assidument.

Le ramadan de la parole est un texte engagé, fort, résolument féministe. Il est une belle porte d’entrée pour un dialogue autour de l’égalité et du respect du corps de la femme. Un texte qui fait un fort écho à l’actualité, embrasée en ce moment par des scandales sexuels en tout genre.

Le vêtement féminin y trouve une place prépondérante. Il est soit trop peu, soit pas assez, en fonction des normes et valeurs des personnes qui jugent. A travers ces trois nouvelles, le corps de la femme est soit impur et donc doit être caché, soit trop dévoilé et donc objectisé. Quelle est la place de la liberté de chaque femme à disposer de son corps ? Avec force et courage, ces trois héroïnes questionnent leurs normes et affirment à travers les mots leur volonté de réappropriation et de liberté.

Des filles sortant des traces de leurs mères

Ces trois femmes sont très différentes. Elles viennent d’époques différentes, n’ont pas la même religion ni les mêmes problématiques, mais toutes sont en contradiction avec leurs mères.

La première, présentée dans Même les Chinoises n’ont plus les pieds bandés vit en 1920 dans une famille traditionaliste, catholique et qui l’élève dans les bonnes mœurs de l’époque. Elle sera donc une bonne mère et une bonne épouse comme sa mère. Elle portera un corset, des bas et tous les autres vêtements imposés par la société.

La seconde, présentée dans Le ramadan de la parole est une jeune musulmane contrainte par les injonctions de son entourage. Là où le corps de la femme ne doit pas se dévoiler, elle dénote par son refus.

La troisième présente dans A l’affiche a une toute autre problématique. Son combat ne part pas d’une constatation autour de son corps, mais autour de celui de sa mère, exposé en grand sur une affiche pour un parfum. Ce corps que tout le monde juge, sexualise, qui appartient désormais au monde entier.

Le roman en bref

A travers le portrait de trois femmes en quête de liberté, Jeanne Benameur nous dépeint la vision du corps de la femme dans notre société. Un texte engagé, au combien important, qui résonne dans l’actualité comme en chaque femme.

Le ramadan de la parole
Jeanne Benameur
Actes Sud junior, 2014

Ma note : ★★★★☆

Vous cherchez un titre traitant du corps féminin dans notre société ? Vous aimerez : Les monologues du vagin de Eve Ensler.
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